J'écris ce blog pour faire connaître mon sport - ma passion - à tous. Certaines sections s'adressent surtout aux débutants, comme la rubrique "Gestuelle et techniques d'escalade", d'autres relatent mes voyages ou bien les dernières compétitions auxquelles j'ai participé ou assisté. N'hésitez pas à me laisser vos commentaires!

mardi 3 juillet 2012

Retour sur Kalymnos, ou l'Odissée



Telendos au coucher

Rares sont les grimpeurs qui ne voyagent pas. En effet, peut-être de par leur nature curieuse et aventurière, les grimpeurs et grimpeuses de ce monde ont souvent les yeux tournés vers la prochaine destination. Nomades des temps modernes, nous prenons soin de planifier nos vacances et nos longs week-end en fonction de la température, de nos temps libres et des endroits à visiter ou à revisiter.  

Parmi les destinations les plus prisées des varappeurs de tous azimut, la Grèce – Kalymnos en particulier – est souvent sur la liste, et pour cause! En effet, à peine arrivé sur l’île, et malgré la fatigue d’un long voyage (17-18 h minimum si l’on vient du Québec), j’ai vite compris pourquoi tant de gens étaient venus à Kalymnos avant moi. C’est parce que l’endroit est tout simplement paradisiaque.

J'aurais tant à dire sur ce pays, car toutes mes journées ont été remplies de moment magiques. Du début à la fin, j'ai ressenti cette effervescence si unique qui est l'apanage des voyageurs. Même à présent, une semaine après être revenue de ce moment de rêve, j'en ressens encore les bienfaits. 

Samia qui ne craint pas d'affronter les cactus de Telendos!

En route pour Telendos - une petite promenade à 2 euros
À Kalymnos, le vent nous eveloppe d'un parfum de thym, de romarin et de bien d’autres épices qui, à mon avis, apaisent immédiatement l’esprit. On oublie vite les quelques irritants causés par la chaleur et les moustiques dès que l'on regarde un lever ou un coucher de soleil sous l’œil apaisant de Telendos, la petite île de roche, sœur de Kalymnos. Telendos, qui compte également de magnifiques falaises, faisait partie de l'île il y a 500 ans et en a été séparée à la suite d'un tremblement de terre.  

D'ailleurs, l'île elle-même est très charmante. Elle n'a pas de route, et donc aucun véhicule, seulement quelques maisons, restaurants et auberges s'y entassent le long du petit port. Cela en fait un endroit très paisible. Pour les grimpeurs qui aiment être plus isolés, il pourrait s'agit d'une bonne solution de rechange. Il y a bien quelques touristes, mais rien de trop chargé.

Ainsi donc, je vous recommande fortement une visite en Grèce. C’est donc une destination vacance idéal pour le grimpeur qui n’a que quelques semaines libres par année, en plus d’être un paradis de stalactites et de « toufas ». Je peux vous assurer que malgré la chaleur de l'été et les quelques limitations pour ce qui est des falaises "potables", j'ai grimpé au moins chaque jour une voie mémorable. Et souvent plus d'une.  

Climat : de l’escalade en juin?



Ma plus grande crainte, avant de partir, était de ne pas pouvoir grimper à cause de la chaleur. Je savais qu’il était possible de grimper à l’année sur l’île, mais j’ignorais dans quelle mesure. De plus, je ne tolère pas particulièrement bien les grosses chaleurs, et je préfère de loin des températures plus modérées - dans les 20 degrés – pour pratiquer l'escalade ou tout autre sport. Cette appréhension a vite été dissipée, du moins au cours des premiers jours. En effet, nous avons eu la chance de bénéficier d’un vent clément et agréable pendant au moins trois jours. À l’ombre des parois, tôt le matin et jusqu’en début d’après-midi, nous étions agréablement rafraîchies par les effluves méditerranéennes.




J'étais alors certaine que cette température allait persister tout au long de mes 18 jours à Armeos, le petit hameau où se trouvait mon studio. Hélas! Cela n’a pas été le cas. Après quelques sorties, le vent a cessé et la chaleur est devenue plus difficile à supporter. N’empêche, il était toujours possible de grimper, mais il fallait partir avant 9h pour ne pas faire la marche d'approche au soleil. De plus, le retour en après-midi était souvent assez difficile, car Massouri, Arméos et Myrties, les trois hameaux où se logent la majorité des grimpeurs, sont orientés directemetn à l’Ouest. Le soleil y plombe donc tout l’après-midi jusqu’au coucher, et il est très difficile de supporter la chaleur entre 14h et 18h, parfois plus tard même, car il n’y a aucun arbre, aucun nuage, et donc très peu d’ombre.  

Les sites 


Par ailleurs, il est certain que l’on ne grimpe pas aux mêmes endroits selon les saisons. Il faut d’abord choisir les sites où il est possible de grimper assez tard en après-midi. En effet, même si on se lève tôt, la roche est souvent humide le matin à cause de la rosée. Certains sites sont aussi plus humides que d’autres, et donc moins recommandables. Il faut se rappeler que le type de roche prédominant, un calcaire blanc, a tendance à être plutôt glissant par temps humide. 

Mes sites de prédilections, ceux donc que j’ai visité à plus d’une reprise, ont été les suivants : Odyssey, Grande Grotta, Iannis et Spartacus. Par ailleurs, j’ai aussi eu la chance d’aller grimper à Ghost Kitchen, Kalydna, Panorama et Arhi. Voici donc une brève description quelque uns de ces sites. Je dois aussi dire que mon seul regret est de ne pas avoir eu l'occasion d'aller à Sikati Cave, une grotte - que dirais-je un trou! - apparemment incroyable, dans laquelle il faut descendre en rappel. Mais ce n'est que partie remise!

Odyssey 



C’est ici qu’a commencé et que s’est terminé mon voyage. Étrangement, ce n’était pas mon site préféré de prime abord. Je trouvais les voies dans le 6a+/6b+/6c plutôt patinées et pas nécessairement des plus intéressantes. Toutefois, j’y ai trouvé un petit projet l’avant-dernière journée, Island in the Sun, qui s'est avéré être parmi les plus belles voies que j’ai enchaînées au cours de mon séjours.  

Katerine Martin dans Marci Marc, 7c+

Katerine et moi  y sommes retournées à maintes reprises (quatre ou cinq fois) pour diverses raisons. D’abord, nous grimpons des niveaux assez différents, ce qui faisait en sorte que nous étions limitées dans le choix des parois. Ensuite, la saison limitait encore plus nos choix. Odyssey est l’un des plus gros secteurs, grimpable à l’année, et on y retrouve une quantité énorme de voies de tous les niveaux, du 6 au 8. Ainsi, Katerine et moi y avont toutes les deux enchaîné un petit projet lors de notre dernière journée à Kalymnos : Katerine a réussi Marci Marc, 7c+ et moi Island in the Sun, 7a+. C'était un très beau moment.  

Grande Grotta 

 


Avant de partir, c’est un des endroits qui m’intimidait le plus. Sans avoir vu la paroi, je me doutais qu’il s’agissait d’une énorme grotte déversante. Étonnamment, c’est probablement là que j’ai fait la voie qui m’a le plus marquée, et où j'ai vécu de fortes émotions en m’élançant de la paroi après y avoir enlevé la dernière dégaine en nettoyant la voie! Règle générale, je n’ai pas peur de me balancer dans la corde, j’aime même beaucoup la sensation d’être dans le vide. Et malgré tout, lorsque mon corps est parti à toute allure de la paroi, je n’ai pu retenir un cri incroyable de joie, d’excitation et de peur. Un vrai manège!  



C’était à mon premier essai dans DNA. Il s’agissait certainement de la voie la plus déversante que j’ai jamais grimpé. Dès les premiers mètres, j’ai eu le tournis, essouflée en raison de ma position presque horizontale et de mes abdos qui me coupaient la respiration. Même si les prises étaient énormes et généralement très bonnes, je devais prendre une pause à chaque plaquette, pour un total d’environ 7 ou 8 pauses pour me rendre au relais.


En redescendant, j’ai découvert ce que signifiait « nettoyer une voie » en Grèce. Après m’être battue pour enlever les dégaines du haut, je suis arrivée au trois dernières dégaines du bas. C’est là que Katerine m’a averti que je devais « regrimper la voie » pour éviter de frapper les rochers au sol! Épuisée, je ne savais pas si j’allais y arriver. Probablement poussée par la crainte de me fracasser au sol, je suis parvenue à retirer les première dégaines et à regrimper plusieurs mètre – presque la moitié de la voie. Assurée d’être suffisamment haute, je me suis lâchée sans aucune crainte, pour me rendre compte que je m'élançais bien plus vite que prévu! C'était génial! Un autre beau moment.

Un beau repos trouvé in extremis dans DNA (Photo: Caroline Praline)

Ghost Kitchen


Même si je n’y suis allée qu’une seule fois, je dois le dire d’emblée : il s’agit probablement de mon mur préféré! On y retrouve des voies de divers styles, à la fois verticales et déversantes. Les voies déversantes sont parsemées de toufas de toutes sortes, un véritable terrain de jeu pour grands enfants. Le mur est tout simplement magnifique et les voies sont de très grande qualité.  

La fin de Dafni, 6c+  (Photo: Marie-Claude)
Je n'ai pu y aller qu’à une seule occasion, mais je dois admettre que j’aurais aimé y passer plusieurs jours, puisque la majorité des voies sont dans le 6c et le 7a, soit plutôt dans mes cordes. C’est donc absolument à visiter pour quiconque grimpe dans ces cotes (ou moins forts) et veux s’initier à l’escalade tridimensionnelle ou pour se mettre en forme au début de séjour. À ce titre, je vous recommande Dafni (6c+), une des voies les plus étonnantes jamais vues. La description du livre-guide est en soi assez révélatrice : « Full-body contact climbing on huge stalactites mushrooms ». En effet, la voie est très déversante, et même si les stalactites sont immenses (on peut s'y coucher confortablement), chaque passage me demandait beaucoup de « jus ». J’ai donc « épousé » la roche autant que je le pouvais, m’y glissant, m’y graffignant sans relâche, pour terminer victorieuse après un 30 mètres de bataille épique.  

Iannis



Dans l'antre du dragon - Sevasti, 7b

J’ai beaucoup aimé Iannis. C’est un tout petit mur, qui accueille tout au plus une vingtaine de voies toutes très jolies. Assez semblable à Spartacus à certains égards – une petite grotte au milieu avec quelques stalatites et des murs verticaux ou en dalle sur les côtés -, mais avec des fins de voies parfois difficiles et techniques, avec des passages délicats sur des réglettes un peu glissante (du moins en été). J’ai adoré essayé Sevasti, un 7b assez court avec un début intéressant et un crux tout en puissance. Entre autres avantages, la marche d’approche est courte (15 ou 20 minutes) et assez facile, et on peut y grimper certaines voies à l’ombre jusqu’à 15h.   

Spartacus



Un autre mur incroyable que je vous recommande fortement. La marche est un peu plus longue que la Grande Grotta, mais certaines voies y sont à l'ombre jusqu'à 17h30 (le livre dit 18h, mais j'en doute. À 17h, il y fait déjà trop chaud). Je recommande d'y grimper Les Amazones, 6c, une voie superbe et variée.

Kerveros, 7a (photo: Marylène Pelland)


Kalydna


Kalydna est un mur un peu différent, avec plus de voies verticales et même en dalle. Je dois admettre que j'aime généralement les dalles et les voies techniques, mais ce n'est pas le style que j'ai préféré à Kalymnos. Le calcaire gris est très corosif et les mouvements me paraissaient souvent moins intéressants que ceux dans les dévers pleins de stalactites. Ce qui est agréables en Grèce, ce sont les prises, qui sont souvent originales et agréables à prendre. À côté de cela, le calcaire gris me paraissait moins vivant. L'autre élément ennuyant, c'est que les voies étaient assez loins les unes des autres, et il fallait passer sur des vires reliées par des cordes pour aller faire les voies tout au fond à droite. Pas très pratique quand le soleil se point à 15h.

Traverses sur corde à Kalydna

Le water soloing : découverte d’un merveilleux lagon


Le lagon bleu, vu du bâteau (Photo de: Marc-André)
 Évidemment, tout voyage qui se respecte doit comporter quelque chose de nouveau. Je n'avais jamais fait de watersoloing avant ce jour. Pour les néophytes, il s'agit de grimper sans corde n'y protection au-dessus d'un point d'eau.

Le site, un petit lagon bleu des plus enchanteurs, vaut définitement un après-midi de visite. Sans plus, j'ose avouer, car la roche n'offre pas des lignes incroyables. Elles est de piètre qualité et fait très mal aux mains et aux pieds, si on ose si aventurer sans chaussons.

Néanmoins, l'endroit, isolé et calme, avec ses eaux turquoises, en vaut bien le détour.

Marc-André s'élance


L’hébergement


Je dois remercier vivement Adonis Galouzis et sa compagne Poppy pour avoir teinté mon séjour d'une note tout à fait authentique et pittoresque. Le couple dans la soixantaine, tout à fait charmant, ne parlait que le Grec. Poppy nous confectionnait des repas typiques - ou enfin de son crû - presqu'à tous les jours, en plus de nous saluer et de nous inviter de temps à autres pour nous parler en Grec pendant des moments interminables. Ah, que de bons souvenirs!

L'endroit était certe un peu plus cher que d'autres studios (50 euros pour 4 personnes; comparativement, j'ai connu des gens qui payaient 28 euros pour 4 personnes ou 17 euros pour deux pendant la même période de l'année), mais il était très confortable. Par confortable, j'entend un air climatisé qui fonctionne, une salle de bain munie d'une vraie douche, une grande cuisine munie d'une vraie cuisinière et d'un frigo, et une très belle terrasse - quoique plutôt dangeureuse pour la gamine de 3 ans qui nous accompagnait et qui a failli à mainte reprise passer par-dessus bord. Enfin! 

 

Les amis et autres rencontres



Dernier souper à Arméos avant le grand départ (Photo de: Marylène et Nicolas)
Finalement, ce qui nous fait réellement aimer un endroit, ce sont souvent les gens qu'on y rencontrent. Déjà, j'ai eu la chance de partie avec une amie et partenaire d'escalade extraordinaire, Katerine Martin, ainsi qu'avec sa mère et sa fille de trois ans, qui ont toutes égayé mes journées. Ensuite, j'ai eu la chance de me lier à nos hôtes tout à fait charmants. Nous avons fait bien des rencontres, mais je dois dire que j'ai particulièrement côtoyé des Québécois ou des francophones, et bien apprécié apprendre à mieux connaître mes voisins de Hull, Caroline et Félicien (étrangement, c'est en voyage qu'on s'est le plus lié d'amitié), ainsi que deux autres grimpeurs de Montréal, Nico et Marylène. Il y a aussi eu bien sûr la petite famille de Québec, Marie-Claude, Marc-André et les très gentilles (et excellentes grimpeuses en devenir) Eve et Mia. De même que nos voisins de chambre, Isandre, Sébastien, Kana et Michel, qui nous ont bien fait rire, jour après jour. Et aussi, je dois sincèrement remercier Myriam et son copain Simon, guide à Kalymnos, pour leur entrain, leurs conseils, et l'aide précieuse de Myriam à titre d'interprète!

Ève l'air songeur - Mia, qui se repose dans le premier toufa de Dafni
Samia et moi en sortant du petit avion, à Kalymnos

Ok, petite série de photos du même moment, Samia et moi sur la plage, parce qu'elles sont trop belles:









Alors voilà, j'espère que je vous ai fait rêver un peu!

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Et pour continuer le voyage, pour que vous sentiez vraiment ce que j'ai ressenti, voici un petit vidéo fait en Grèce par des locaux. La première partie, la voie Alfredo Alfredo, se trouve à Odyssey. La seconde partie est dans un nouveau secteur à ce que dit le vidéo, mais j'ignore où.

http://vimeo.com/44916238

Je suis certaine qu'en regardant le vidéo, vous sentez le vent dans vos cheveux, l'air salin, le romarin, la roche douce ou rêche sous vos mains. Vous avez les mains moites? Allez vite, planifiez votre prochain voyage dans les îles grecques! L'économie grecque en a bien besoin, et les gens y sont fantastiques, aucun souci là-dessus!